Audiologie Demain (AD) : Sonance fête cette année ces six ans d’existence et franchit le cap des 100 centres. Pouvez-vous revenir sur la création de l’enseigne ?
Laurent Buri (LB) : Mon épouse, Anne-Sophie, elle-même audioprothésiste, et moi-même étions installés depuis le début des années 2000, dans le sud de l’Ardèche, sous l’enseigne AuditionSanté. Lors de son rachat en 2013 par le groupe Sonova, nous avons choisi de partir. Ne nous reconnaissant dans aucune autre enseigne, nous nous sommes alors associés à Hervé Bouberka, qui bénéficiait de près de vingt ans d’ancienneté sur le secteur, pour créer la nôtre, celle qui correspondrait à notre vision de la profession. Nous souhaitions une enseigne indépendante qui modernise l’audioprothèse, qui véhicule une image plus « sexy » et dynamique que ce qui se faisait à l’époque. Et, surtout, nous voulions bâtir un réseau au sein duquel la satisfaction du patient prime sur tout le reste et représente le cœur du business model des audioprothésistes qui y adhèrent.
Sonance est ainsi née en 2014. Nos six centres ont été les premiers à passer sous la nouvelle enseigne. Très vite, nous avons été rejoints par une vingtaine d’audioprothésistes. Ces adhérents de la première heure constituent le noyau dur de Sonance. À partir de 2016-2017, nous avons commencé à communiquer, à donner des conférences dans les écoles… Autant de graines qui nous permettent, depuis, de rentrer 20 à 25 nouveaux centres chaque année. En octobre 2020, nous avons largement franchi la barre symbolique des 100 centres et atteint les 120 centres. La majorité de nos ouvertures sont des créations, avec, à leur tête, 70 % de jeunes audioprothésistes qui choisissent l’indépendance.
Nous proposons un modèle premium dont la clé de voûte est la qualité.
AD : Qu’est-ce qui, selon vous, attire ces jeunes audioprothésistes chez Sonance ?
LB : Les maîtres mots de Sonance sont indépendance et qualité de service. Les audioprothésistes qui font le choix d’adhérer à l’enseigne cherchent avant tout à conserver une totale indépendance, en même temps que le soutien et les avantages que peut offrir une marque forte. Nous proposons un modèle premium dont la clé de voûte est la qualité.
Sonance, c’est aussi la force d’un réseau, d’une communauté de professionnels partageant une même vision de la profession. Il ne s’agit pas d’une enseigne ouverte à tous. Nous sommes très attentifs au casting et souhaitons travailler avec des personnes qui nous ressemblent et ont à cœur l’intérêt du patient. Nous nous entourons d’adhérents éthiques et sympathiques, qui mettent la réussite de l’appareillage avant la réussite financière. Cet esprit amical, nous l’entretenons au cours de réunions deux à trois fois par an et par un fonctionnement très collaboratif. Nous sommes à l’écoute des adhérents et mettons en place, pour les projets qui le nécessitent, des commissions qui nous permettent de réfléchir et avancer ensemble.
Ce qui rassure nos adhérents, c’est qu’à la tête de Sonance, il y a des audioprothésistes. Nous connaissons leurs problématiques et partageons les mêmes enjeux ; nous pouvons les aider.
AD : Quel est le modèle Sonance ?
LB : Il s’agit d’une licence de marque, qui valorise l’expertise et les valeurs de notre métier. Nous proposons un accompagnement personnalisé à nos adhérents et notamment une aide à l’installation pour le choix de l’implantation, le business plan, l’aménagement d’un centre… Au travers d’un contrat d’affiliation, Sonance protège chaque audioprothésiste par une zone de territorialité, en lui garantissant une exclusivité locale, qui lui permet de se développer à son rythme, sans menaces de concurrence directe d’un audioprothésiste de la même enseigne.
La qualité est également au cœur de notre communication. Nous avons créé un pôle marketing avec un plan de communication annuel. Les adhérents disposent d’outils sur mesure leur permettant de gérer leur communication de façon autonome. Nous avons par ailleurs développé du co-branding avec les fabricants, ce qui permet aux audioprothésistes de communiquer sur une marque en particulier s’ils le souhaitent. Enfin, ils bénéficient d’une centrale d’achats référençant l’ensemble des fournisseurs.
Nous mettons également l’accent sur la qualité de la formation, l’essence de notre métier et le fondement de notre différenciation. Nos modules de formation sont eux aussi à la carte et permettent de garantir la meilleure prise en charge possible, dans le respect d’un protocole que nous demandons à nos adhérents de respecter, avec réalisation de mesures in vivo et d’audiométrie vocale dans le bruit.
Adhérer à Sonance suppose en retour d’adopter la marque et sa charte graphique. Les audioprothésistes qui nous rejoignent s’engagent à mettre leur laboratoire aux normes d’accueil et d’hygiène actuelles et à suivre les formations que nous leur proposons.
AD : Votre associé et directeur général, Hervé Bouberka, a récemment assuré sur les réseaux sociaux qu’« aucun virage ne serait négocié ». Comment envisagez-vous le développement de Sonance ?
LB : Cela sous-entend que, malgré l’accélération de notre expansion, nous n’allons pas changer notre façon d’être et de faire. Nous resterons sur nos fondamentaux. Nous n’ambitionnons pas d’atteindre les 300 ou 400 centres ou de devenir l’enseigne n°1 des indépendants. Nous ne nous sommes jamais fixé d’objectif financier ou de quantité. Nous souhaitons en revanche continuer à nous développer qualitativement, pour parvenir à un maillage national et ainsi proposer le service Sonance partout en France.
Il n’y a jamais eu autant de place pour les indépendants qu’aujourd’hui.
AD : Est-ce compliqué aujourd’hui d’être indépendants ?
LB : Absolument pas, je pense qu’il n’y a jamais eu autant de place pour les indépendants qu’aujourd’hui. Nous sommes sur un marché en pleine expansion et il reste encore beaucoup de malentendants à appareiller. Comme tout secteur qui atteint une certaine maturité, il s’instaure une segmentation. Mais il y a de la place pour tout le monde. Nous ne nous adressons pas à la même patientèle. Si certains patients cherchent le prix, je pense néanmoins que les consommateurs aujourd’hui attendent d’être rassurés par un expert. Ils choisissent un professionnel qui ne fait que de l’audiologie et qui s’engage dans une prise en charge de qualité.
Je n’ai pas d’inquiétude non plus concernant le 100 % Santé. Nous y verrons certainement plus clair début 2021. Je ne pense pas que les complémentaires pousseront outre mesure les appareils de classe I. Elles n’y ont aucun intérêt. Et, le risque est que ces pratiques conduisent à certaines dérives.
Nos patients veulent s’appareiller aujourd’hui et bien s’appareiller. Tous ne voudront pas de classe I, mais c’est une excellente chose que les malentendants qui ne pouvaient se procurer des aides auditives pour des raisons financières puissent le faire désormais. Et, si les ventes de classe I atteignent les 30 %, nous nous adapterons.
AD : Sonance a créé la surprise en adhérant au Synea fin 2019. Pourquoi ce choix ?
LB : Suite à des discussions avec Richard Darmon et Guillaume Flahault, respectivement vice-président et président du Synea, nous sommes entrés au Synea auquel d’autres enseignes d’indépendants adhéraient à l’époque. Ce syndicat représente une grande partie des entreprises de l’audioprothèse, quel que soit leur positionnement, et Sonance est l’une de ces entreprises. Je participe à toutes les réunions et je suis frappé par l’écoute entre les différentes enseignes. Toutes essaient d’avancer dans le même sens et dans l’intérêt du secteur. Les discussions y sont collégiales. D’autre part, j’adhère également au Syndicat des audioprothésistes (SDA), comme la plupart des audioprothésistes de notre réseau et j’encourage tous mes confrères à le faire. Nous sommes d’ailleurs très fiers que l’un de nos adhérents, Alexandre Durand, ait été nommé administrateur au sein du SDA en juillet dernier.
Selon moi, le SDA est le syndicat de tous les audioprothésistes : indépendants et salariés. Il est primordial qu’il le reste pour continuer à défendre notre profession. Quant au Synea, il doit rester le syndicat de toutes les enseignes, indépendantes ou pas. Je suis convaincu que ces deux syndicats peuvent et doivent travailler ensemble dans l’intérêt de notre métier.