En novembre 2022, coup de tonnerre dans le landerneau de l’audioprothèse : LMCA, sous bannière Audition Conseil depuis 25 ans, annonce le rachat de l’enseigne au groupe Schertz, sous la houlette de Stéphane Bardet. Pour réussir ce tour de force, le dirigeant a dû rassurer les banques sur la bonne santé du marché de l’audioprothèse. Il s’est attaché pour cela les services d’un cabinet d'audit, Strategy&, afin de produire une analyse prospective du secteur. Il en a présenté les principaux résultats lors du 43e congrès des audioprothésistes, qui s’est déroulé à Paris en mars 2023. « Il était important de présenter ces chiffres extrêmement intéressants, juge Stéphane Bardet. L’objectif était d’une part de fournir un attrait supplémentaire à ce congrès, qu’il faut continuer de faire exister, c’est indispensable. D’autre part, je souhaitais convaincre mes confrères indépendants de la bonne santé du secteur, et éviter qu’ils ne tombent dans une sorte de sinistrose les amenant à vendre. »
Trois scénarios pour l’avenir du marché
Dans cette étude, l’audioprothésiste et entrepreneur présente notamment une projection du marché de l’aide auditive. Plusieurs scénarios ont été envisagés, en fonction du taux d'équipement, du taux de renouvellement au bout de 4 ans et avant (perte ou casse). Ainsi, le premier scénario se base sur un taux d’équipement de 56 %, un renouvellement de 45 % des appareils achetés 4 ans auparavant, mais aussi 5 % des appareils renouvelés avant 4 ans, pour casse ou perte. Dans le deuxième scénario, seul le taux d’équipement change (58 %). Ce dernier se maintient à 58 % dans le dernier scénario, mais le renouvellement varie entre 50 et 60 % en fonction des années.
Un phénomène cyclique
Quel que soit le scénario, l’étude prévoit un phénomène cyclique, avec une baisse des ventes jusqu’en 2024 (3 ans après la mise en place du 100 % Santé), puis une hausse sur les deux ou trois années suivantes. C’est la conséquence de la mise en place de la réforme, qui a provoqué un pic de ventes en 2021. « Il y a eu un effet de concentration des ventes dans le temps, explique Stéphane Bardet. Certains patients ont attendu la mise en place du 100 % Santé pour s’appareiller, d’autres ont anticipé un renouvellement, ce qui instaure un cycle que l’on n'observait pas avant. »
« Déçus de la classe I »
Ainsi, les ventes d’aides auditives passeraient de 2,21 G€ en 2021, à 2,30, 2,24 ou 2,15, selon le scénario, en 2027 (voir graphe). En volume, cela correspondrait à 1,9, 1,8 et 1,7 millions d’unités vendues en 2027. Ainsi, si l’on considère le scénario intermédiaire, qui colle davantage aux chiffres de début 2023, le marché devrait progresser de 1,6 % en valeur et 2,1 % en volume entre 2022 et 2026. Cette différence est notamment due à une baisse du prix moyen des aides auditives, provoquée par une forte proportion de vente de classe I. Ce dernier, qui est passé de 1 508 à 1 304 € entre 2019 et 2021, devrait encore baisser pour atteindre 1 265 € en 2027. Néanmoins les ventes de classe I commencent à baisser légèrement, observe l’audioprothésiste : « Aujourd’hui, dans nos centres, nous voyons arriver des déçus de la classe I. Ils ont opté pour des appareils 100 % remboursés, mais qui ne disposent pas de technologies basées sur l’intelligence artificielle ou de puissance de calculs des appareils de dernières générations. Or ces fonctionnalités répondent aux premiers besoins des patients, à savoir les discussions en groupe. Ces patients opteront pour la classe II lors du renouvellement. »À noter que l’étude ne prend pas en compte la fin de la dérogation de primo-prescription des médecins généralistes. Or, cette mesure a eu un effet sur les ventes d’aides auditives, selon Stéphane Bardet.