Vous jugiez la mise en application du 100 % Santé un brin compliquée ? Vous ne serez pas déçu·e par la loi anti-cadeaux. Les législateurs français ont été, une fois encore, à la hauteur de leur réputation. Et ça n’est pas fini ! Car s’il y a eu du nouveau pendant l’été concernant cette loi, le feuilleton n’est pas encore terminé et certains décrets sont toujours attendus. Toutefois, la difficulté de ce parcours entraînant une certaine confusion, nous avons jugé utile de procéder à une petite mise au point. L’évolution estivale consiste en la mise en application partielle de la loi anti-cadeaux. Pourquoi partielle ? Parce que certains des articles de cette loi nécessitent des décrets d’application. D’autres, non. Pourquoi cette différence de traitement ? Pour comprendre, il est nécessaire de revenir un peu en arrière. Les nouvelles disposition de la loi anti-cadeaux ont été insérées dans l’ordonnance du 19 janvier 2017. L’article 180 de la Loi de modernisation de notre système de santé de Marisol Touraine, dite « Loi Santé » (2016), permettait en effet que les dispositions de la loi anti-cadeaux (loi Bertrand de 2011) soient modifiées par ordonnance. Cette ordonnance devait être ratifiée. Elle l’a été, par le biais de la loi d'organisation et de transformation du système de santé d’Agnès Buzyn (fin juillet 2019). Dans cette dernière mouture du texte, certaines dispositions constituent des interdictions pures et simples, pour lesquelles aucun texte d’application n’est donc nécessaire. C’est interdit, point ! Les dispositions comportant des seuils, des autorisations, des exceptions… nécessitent en revanche des précisions, qui seront apportées par les décrets, dont certains doivent être pris en Conseil d’État, ce qui ralentit encore un peu la procédure. En coulisses, on espère que le texte définitif sera applicable début 2020, voire toute fin 2019.
Tu ne demanderas pas l'hospitalité
Mais la ratification de l’ordonnance, via la loi d’Agnès Buzyn, n’a pas été une ratification sèche : en effet, les parlementaires ont modifié des dispositions de l’ordonnance. Et certaines de ces modifications sont cruciales, notamment celle apportée par l’article 77 V D 2°. Elle exclut en effet les étudiants de l’autorisation d’hospitalité. Ainsi, les fabricants de dispositifs médicaux – implants cochléaires et aides auditives, donc – et ceux qui les commercialisent – les enseignes – ont depuis cet été interdiction d’offrir l’hospitalité à des étudiants en médecine, en audioprothèse, en orthophonie ou tout autre profession paramédicale, lors de congrès, de formation, etc. L’hospitalité est en effet tolérée pour les professionnels de santé – dans la limite du raisonnable – mais pas pour les étudiants, comme le précise L1453-7 alinéa 4, du code de la santé : L'hospitalité offerte, de manière directe ou indirecte, lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel ou scientifique, ou lors de manifestations de promotion des produits ou prestations mentionnés à l'article L. 1453-5, dès lors que cette hospitalité est d'un niveau raisonnable, strictement limitée à l'objectif principal de la manifestation et qu'elle n'est pas étendue à des personnes autres que celles mentionnées à l'article L. 1453-4, à l’exception des étudiants en formation initiale mentionnés au 2° du même article L. 1453-4 et des associations d’étudiants mentionnées au 3° dudit article L. 1453-4.
Amende et prison
Par hospitalité, on entend restauration, hébergement, transport ou encore inscription à un congrès par exemple. Les étudiants ne peuvent donc plus se faire offrir de repas, se faire rembourser les frais engagés pour se rendre à un congrès, une formation, etc. par un fabricant ou une enseigne. Enfreindre ces lois expose à un risque d’un an d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende (le double pour les entreprises offrant l’hospitalité). Dura lex sed lex.