En France, environ 7 millions de personnes, majoritairement âgées de plus de 65 ans1, sont confrontées aux déficiences auditives. D’ici 2035, ce chiffre augmentera de près de 20 %2 par rapport à 2020, atteignant ainsi 8 millions de personnes malentendantes. Les déficiences auditives ont un impact significatif sur la santé et les relations sociales. À ce titre, les troubles auditifs représentent un risque accru de dépression, de démence et de dépendance3. Chez les enfants, une perte auditive peut provoquer un retard dans l'acquisition du langage et entraîner une fatigue plus importante en raison des efforts supplémentaires nécessaires pour comprendre.
Devant cette problématique qui touche des millions de concitoyens, il est impératif de mettre en place un acteur clairement défini, capable de répondre aux attentes des acteurs de la filière auditive et de concrétiser une politique ambitieuse pour la santé auditive. Confrontés à des défis considérables et urgents, nécessitant une action interministérielle coordonnée, la création d'un délégué à la Santé Auditive se révèle comme une nécessité absolue. C'est l'opportunité, à la suite de ce remaniement ministériel, de faire de la santé auditive une priorité nationale, une cause qui transcende les clivages et mérite une action coordonnée de tous les ministères concernés.
Dans cette lutte contre les risques grandissants qui pèsent sur la santé auditive des adolescents, le délégué interministériel à la Santé Auditive devra tisser des liens étroits avec le ministère de l'Éducation nationale. Avec près de 47%4 des jeunes exposés à des niveaux sonores dépassant les 85 décibels pendant plus de deux heures par jour, l'heure est à l'action préventive. Il faut investir massivement dans la sensibilisation au bruit dès les premières années d'éducation, que ce soit à l'école, au collège, ou au lycée, afin de préserver la santé auditive de la population française à long terme. Nous sommes à un moment décisif où l'éducation et la prévention peuvent façonner la santé auditive des générations à venir.
Une action est également à mettre en œuvre dans le champ du travail en se mobilisant sur les risques auditifs liés aux pratiques professionnelles. Cela inclut la fatigue auditive croissante associée au télétravail et à l'exposition au son compressé, ainsi que la protection des travailleurs concernés par des bruits forts sur leurs lieux de travail, tels que les chantiers ou les transports en commun.
Le délégué interministériel à la Santé Auditive pourra coordonner des actions étendues en lien avec les administrations, comme la mise en œuvre d’une épidémiologie précise des surdités en France, en particulier des surdités sévères à profondes. Il aura la capacité d'engager d'autres partenaires, comme les municipalités, les départements et les régions, dans le dépistage des troubles auditifs. Cette collaboration s'opérera en concertation avec le ministre en charge des Collectivités Territoriales. Il aura la possibilité de mettre en place, en collaboration avec le ministère de la Culture, des initiatives visant à améliorer l'accès aux manifestations culturelles pour les personnes malentendantes et d'accélérer la mise en œuvre de mesures préventives, telles que la création de zones de repos auditif, lors des événements festifs.
En dernier lieu, ce délégué interministériel dédié à la santé auditive, que nous proposons de placer sous l'égide de Madame Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé et des Solidarités, jouera un rôle central dans la concrétisation des mesures nécessaires à l’amélioration du parcours de soins des personnes atteintes de surdité. Il pourra s'appuyer sur les recommandations éclairées du rapport5 de l'IGAS et de l'IGESR concernant la filière auditive et ainsi déployer des actions concrètes à court, moyen et long terme.
Les propos tenus dans les tribunes sont sous la responsabilité de leurs auteurs et ne reflètent pas forcément l’opinion d’Audiologie Demain.