17 Décembre 2025

Article réservé aux abonnés

Quand la santé auditive devient une ressource

Invitée du congrès de l’EUHA lors de la journée Sound of Future, la futurologue allemande Anja Kirig a consacré sa conférence à la transition d’une santé réparatrice vers une santé préventive. Une mutation qui place l’audition au cœur du bien-être et redéfinit le rôle de l’audioprothésiste comme acteur clé d’une approche proactive de la qualité de vie.

Propos recueillis par Sonia Belli
futurologie

Vous êtes futurologue. Pouvez-vous expliquer en quoi consiste votre travail ?

Il repose sur l’observation des grandes tendances, ou megatrends, telles que la mondialisation, la transition numérique, le changement climatique, etc., et sur l’analyse de leurs effets sur nos modes de vie. À partir de ces mégatendances, mon rôle est de dégager des lignes prospectives : soit dans une approche de prévision (« Comment vivrons-nous en 2035 ? »), soit dans une approche de projection stratégique (« Quelle société voulons- nous en 2035 et comment y parvenir ? »). Mon activité combine donc beaucoup de recherche, d’élaboration de thèses, mais aussi du travail en réseau avec d’autres collègues et en collaboration avec des experts.

Votre présentation à l’EUHA portait sur « La santé comme ressource : l’avenir de la prévention en audiologie ». Quelle en est l’idée centrale ?

Nous assistons à une véritable transformation de notre manière de concevoir la santé : elle n’est plus seulement l’absence de maladie, mais une ressource dynamique à cultiver. La prévention devient un principe directeur des sociétés tournées vers l’avenir. Elle ne se limite plus à éviter la maladie, mais vise à prolonger activement la durée de vie en bonne santé des individus. À mes yeux, c’est une véritable « industrie de la prévention » qui est en train d’émerger, et qui s’étend bien au-delà du champ médical : elle se déploie à travers les technologies, la nutrition, le bienêtre, le fitness ou encore le coaching… Tout cela participe d’une même logique.

Penser la santé auditive comme une ressource, c’est changer de paradigme : ne plus soigner une perte, mais cultiver un potentiel. L’enjeu ? Agir avant le déficit, prolonger le lien social, la qualité de vie et l’autonomie.

Que signifie, dans ce contexte, considérer la santé auditive comme une ressource ?

Penser la santé auditive comme une ressource, c’est changer de paradigme : ne plus soigner une perte, mais cultiver un potentiel. L’enjeu ? Agir avant le déficit, prolonger le lien social, la qualité de vie et l’autonomie. L’audition devient alors une ressource à préserver et à valoriser. Dans cette perspective, la santé auditive ne relève plus uniquement de la médecine, mais d’un mode de vie associant responsabilité individuelle, technologie et recherche du bien-être.

La prévention occupe donc une place essentielle dans cette approche ?

Oui, elle devient un élément intégré et structurant d’un véritable écosystème de santé, bien au-delà d’une démarche individuelle. On passe d’une logique de compensation d’un déficit à une logique proactive d’optimisation de la qualité de vie. Les aides auditives, par exemple, ne se limitent plus à des dispositifs médicaux : elles peuvent devenir des objets du quotidien, intégrés, esthétiques et valorisants. Dans ce contexte, le rôle du professionnel de santé évolue vers celui d’un acteur central d’une nouvelle économie et société de la prévention.

Pourquoi ce thème a-t-il naturellement trouvé sa place au congrès de l’EUHA ?

Parce que l’audiologie se situe au croisement de la médecine, de la technique, de la culture et de la vie quotidienne. Dans une société vieillissante, l’audition est essentielle à la participation sociale et au maintien du lien. Le secteur dispose donc d’un formidable potentiel pour devenir pionnier d’une nouvelle culture de la prévention, à l’interface du soin, de la technologie et du bien-être.

Les audioprothésistes occupent une place centrale dans la prévention, bien au-delà de la simple correction du déficit auditif.

Quel rôle les audioprothésistes peuvent-ils jouer dans une approche proactive de la santé auditive ?

Les audioprothésistes occupent une place centrale dans la prévention, bien au-delà de la simple correction du déficit auditif. Cette évolution ouvre de nouvelles perspectives : partenariats avec le bien-être, collaborations culturelles ou éducatives, intégration des innovations numériques et de l’intelligence artificielle… L’intérêt croissant du public pour le silence, les environnements calmes ou la maitrise du bruit crée également de nouveaux champs d’action.

Mais cette transformation pose aussi des questions éthiques : la prévention doit-elle devenir un devoir ? Comment la rendre accessible à tous ? Le secteur de l’audition a ici une responsabilité particulière : se positionner comme un partenaire de confiance, garant d’une prévention fondée sur des données fiables, capable de distinguer les démarches réellement efficaces des simples arguments commerciaux.

Anja Kirig
Anja Kirig est chercheuse en prospective et en tendances.
Audiologie Demain
La suite de cet article est réservée aux abonnés à Audiologie Demain.

Plébiscitez une information aux petits oignons !

Nos formules d'abonnement

Offres d'emploien partenariat avec audixion.fr

Voir plus d'offres

Newsletter

Newsletter

La newsletter Audiologie Demain,

le plus sûr moyen de ne jamais rater les infos essentielles de votre secteur...

Je m'inscris