Vincent Lefèvre, directeur général d'AudioLibre : « En rejoignant AudioLibre, les adhérents conservent leur indépendance sans être isolés pour autant »

Une nouvelle centrale a vu le jour en janvier 2022. AudioLibre affiche de solides arguments : des bases fortes avec son pendant Optic Libre et une vision stratégique reposant sur un binôme d’experts issus de la distribution et de l’industrie. À la manœuvre, Gilles Bevilacqua, responsable du réseau, et Vincent Lefèvre, directeur général d’Olint Group, revendiquent un modèle différent, façonné pour accompagner les audioprothésistes indépendants dans un secteur en pleine mutation.

Propos recueillis par Ludivine Aubin-Karpinski
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Vincent Lefèvre, directeur général d'Audiolibre.

Audiologie demain (AD) : AudioLibre est une société du groupe Olint qui possède déjà la centrale OpticLibre. Comment se positionne cette dernière et allez-vous simplement dupliquer le modèle en audio ?

Vincent Lefèvre (VL) : OpticLibre est aujourd’hui l’une des centrales d’achats leader sur le marché français et n° 1 en Belgique. À l’origine constituée autour d’un noyau dur d’opticiens indépendants, elle s’est développée. Ce cœur historique alimente l’esprit d’OpticLibre et s’incarne dans le Club Optic Libre où sont réunis les entrepreneurs bénéficiant d’une activité importante. Il s’est construit sur des valeurs fortes d’indépendance et d’expertise. Cet ADN est également partagé aujourd’hui par les adhérents d’AudioLibre.

Pour autant, bien que les deux centrales aient en commun ce positionnement, AudioLibre est une société distincte. Si nous n’écartons pas les synergies, nous comprenons les différences essentielles entre les deux secteurs. La croissance qu’enregistre aujourd’hui l’audioprothèse attire de nombreux acteurs mais, très souvent, avec des clés de compréhension qui ne sont pas les bonnes et un objectif de diversification à tout prix. Penser que l’on peut dupliquer les recettes d’un marché de produit à un marché de service n’a pas de sens. Gilles Bevilacqua et moi-même connaissons particulièrement bien ces deux mondes et percevons notre rôle avant tout comme celui de conseil et d’accompagnement dans un environnement en mutation.

AD : Pourquoi une nouvelle centrale ?

VL : Le secteur connaît de nombreux développements d’enseignes ou de licences de marque. Le segment de la centrale, quant à lui, est plus réduit. La moitié des indépendants sans enseigne nationale aujourd’hui n’adhérent pas à ce modèle car ils n’y voient pas leur intérêt. Pourtant, la centrale constitue l’outil par excellence de l’indépendance et tous les audioprothésistes, qu’ils soient sous enseigne ou non, se revendiquent comme tels. C’est un marqueur fort pour cette profession.

C’est aussi un modèle « fair play », qui ne coûte que quand on l’utilise. L’audioprothésiste décide en toute liberté de consommer uniquement les services dont il a réellement besoin, sans obligation d’implémentation. Le modèle des enseignes a certes des vertus mais la question est de savoir si le pourcentage que le professionnel verse chaque mois a plus de valeur que l’argent qu’il pourrait investir dans son propre développement. En tant que centrale, nous pouvons accompagner ceux qui le souhaitent à construire leur propre notoriété et à se développer au travers de services qui nous sont exclusifs. Nous offrons une réponse à ceux qui veulent conserver leur ADN propre tout en étant accompagnés sur des axes de performances qui feront leur succès de demain. En rejoignant AudioLibre, les adhérents conservent cette indépendance qui leur est chère sans être isolés pour autant.

AD : À quels profils d’adhérents vous adressez-vous ?

VL : Nous avons identifié deux cibles principales. Tout d’abord, tous les audioprothésistes indépendants, quels qu’ils soient. Ceux qui sont déjà installés dans des structures établies et à qui nous pouvons faire de nouvelles propositions de valeur pour prendre le virage du 100 % santé à nos côtés, ceux qui aujourd’hui n’adhèrent pas encore à une centrale et qu’il va falloir convaincre et, enfin, les audioprothésistes qui souhaitent s’installer en centre exclusif ou intégré.

L’autre cible est constituée des entrepreneurs opticiens. Nous proposons d’accompagner dans leur développement ceux qui ont déjà des centres d’audition ou des corners. Quant à ceux qui souhaitent se lancer en audioprothèse pour générer de la valeur additionnelle ou se positionner sur des centres exclusifs, nous les aidons à le faire de manière qualitative et pérenne. Car, prendre en charge des patients plus âgés, les suivre « gratuitement » pendant quatre ans, diffère radicalement du modèle de l’optique.

Enfin, nous nous adressons aussi aux opticiens qui n’ont pas l’intention de se développer en audio mais qui souhaitent en revanche répondre aux besoins de leurs clients en leur offrant des services supplémentaires. Pour ceux-là, nous nous sommes rapprochés de Sonup pour proposer une solution de tests d’audition, générant des leads vers des audioprothésistes partenaires. Cette offre leur permet de créer du chiffre d’affaires additionnel tout en étoffant positivement l'expérience clients dans leur magasin et en valorisant leur rôle de professionnels de santé.

AD : Vous revendiquez un positionnement « différent ». Quel est-il ?

VL : En effet, nous avons fait des choix « impliquants » pour proposer une offre singulière et très qualitative à nos clients, tout au long de leur vie d’entrepreneurs, de l’installation à la transmission. Ce positionnement s’exprime dans des partis pris forts et des recommandations stratégiques en matière d’achats, de système de gestion... Nous nous adaptons aux problématiques de chacun et aux réalités locales pour garantir des prestations véritablement personnalisées, avec des partenaires sélectionnés sur la qualité de leurs services ou produits.

Pour ceux qui souhaitent s’installer en audioprothèse plus particulièrement, nous avons noué des partenariats avec deux principaux industriels nous permettant de proposer une solution clé en main associant, à des tarifs préférentiels, équipement de la cabine, financement du matériel, formations, campagnes promotionnelles... Une offre packagée inédite leur simplifiant la vie au moment de leur installation et leur assurant de pouvoir se concentrer sur l’essentiel. Il n’y a rien de pire que de perdre du temps sur des aspects qui ne relèvent pas du cœur de métier, a fortiori dans un contexte où il est crucial de gagner en productivité.

Autre spécificité, dont nous faisons un élément de poids dans notre différenciation : nos adhérents accèdent à des conditions commerciales garanties pour tous les fournisseurs. Là encore, nous avons choisi de casser les codes habituels en termes d’achats pour apporter de la souplesse à nos clients, notamment dans le cas bien particulier d’un démarrage d’activité.

Nous avons choisi de casser les codes habituels en termes d'achats pour apporter de la souplesse à nos clients.

Nous accompagnons également les audioprothésistes dans les problématiques d’optimisation patrimoniale et de cession. Vendre n’est pas une fin en soi et il est bon de s’assurer que céder son activité et opter pour le salariat après trente ans d’indépendance est la bonne option. Nous aidons nos adhérents à trouver le modèle financier le plus adapté à leurs objectifs. Il n’existe pas une solution unique à toutes les problématiques individuelles ; nos expertises cumulées nous permettent des recommandations personnalisées pour chaque cas de figure et de trouver les meilleures configurations.

Nous souhaitons cultiver un esprit agile « start-up » qui se traduit, notamment, par la promotion d’un écosystème d’innovations. Nous pouvons déjà citer entre autres Sonup pour la synergie optique-audition, Audiowizard pour les logiciels de gestion de centres exclusifs, ou en mettant l’accent sur la digitalisation de la prospection ou de la fidélisation.

AD : Vous faites la promotion de l’esprit de club au sein d’AudioLibre. Comment va-t-il s’exprimer concrètement et comment l’entretenir au fur et à mesure des adhésions ?

VL : Cette notion de communauté est en effet l’un des piliers sur lesquels repose la centrale. Nous souhaitons nous développer avec des audioprothésistes qui partageront la même vision qualitative de leur métier. Nous prévoyons d’échanger régulièrement autour de sujets métiers bien sûr, mais également entrepreneuriaux et patrimoniaux. Nous pourrons, Gilles et moi, apporter notre vision et notre expérience, notre connaissance aussi d’autres modèles à l’international et nous ferons appel à des contributeurs extérieurs à notre marché pour enrichir nos propositions. Nous organiserons un séminaire en 2023 pour réunir tous les adhérents qui le souhaitent.

AD : Le 100 % Santé impacte le secteur en profondeur. Quels sont les enjeux auxquels sont confrontés les indépendants ? Comment allez-vous les aider à prendre ce virage ?

VL : La réforme soulève des enjeux de productivité pour les audioprothésistes. Comment organiser son centre ? Quels sont les indicateurs à mettre en place ? Autant de questions sur lesquelles nous pouvons apporter notre expertise. Le 100 % santé exige de structurer le parcours de soins dans le centre et d’absorber le flux de nouveaux patients tout en préservant leur satisfaction et la qualité du service. Faire uniquement de la classe I ou a contrario uniquement du haut de gamme, c’est avoir perdu en chemin la notion du besoin du patient. Je reste persuadé que les produits du panier 100 % santé, pour très bons qu’ils sont, ne correspondent pas à la totalité des besoins. Les malentendants doivent pouvoir choisir des appareils ou des fonctionnalités additionnelles qui correspondent à leurs attentes.

D’autres aspects sont importants aujourd’hui et ne concernent pas seulement les indépendants. L’abaissement du prix limite de vente de la classe I est l’un de ces enjeux forts. Se pose également la question des caractéristiques techniques des appareils de classe I. D’elle dépend l’équilibre de notre marché. A-t-on intérêt à mettre davantage de fonctionnalités sur cette offre ? Le fait de basculer à 40 % de classe I a mécaniquement entraîné la chute du prix moyen de vente. Je ne connais pas de marché de dispositifs médicaux où l’intégralité de l’offre est vendue sans reste à charge.

Pour porter ces questions ainsi que les intérêts de nos adhérents, nous avons rejoint le Syndicat des audioprothésistes. Ce partenariat illustre la confiance et l’intérêt que portent les indépendants à notre modèle. Il ne s’agit pas pour nous d’une simple souscription ; nous comptons participer activement aux différentes assemblées, dans le même esprit qui animait mon action syndicale ces dernières années en tant que président de la division audiologie du Snitem.

Nous avons rejoint le Syndicat des audioprothésistes. Ce partenariat illustre la confiance et l’intérêt que portent les indépendants à notre modèle.

AD : Quelles sont vos ambitions pour 2022 et au-delà ?

VL : Nous avons enregistré nos premières adhésions en janvier et ambitionnons d’être rejoints d’ici la fin de l’année par de nombreux nouveaux membres.

D’ici mars-avril, deux animateurs commerciaux viendront étoffer notre équipe avec une expérience forte passée chez des industriels de renom. La maîtrise des réalités économiques et des enjeux de notre secteur couplée à de nombreuses années passées sur le terrain leur permettront d’apporter des conseils avisés aux membres actuels et futurs d’AudioLibre.

Enfin, nous restons à l’écoute d’opportunités stratégiques additionnelles de développement qui pourraient nous permettre de continuer à élargir notre attractivité sur le marché français. Toute évolution potentielle de modèle se fera dans un cadre raisonné et en totale adéquation avec notre objectif premier qui est et restera la satisfaction et le soutien apporté à nos membres. Nous sommes également comme eux entrepreneurs et indépendants d’un point de vue capitalistique.

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