29 Avril 2025

Déserts médicaux : la « mission de solidarité obligatoire » ne passe pas

Dans un climat chauffé à blanc, le Pacte de lutte contre les déserts médicaux présenté par François Bayrou le 25 avril échoue à apaiser les tensions. La proposition d'imposer, dès septembre, aux médecins deux jours de consultation par mois dans les territoires les plus en souffrance ne convainc pas.

Par Ludivine Aubin-Karpinski
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En 2024, 87 % du territoire national étaient considérés en désert médical et 11 % des Français n'avaient pas de médecin traitant.

Le constat est partagé par tous ; les solutions divisent. Et pas qu’un peu. Alors que les médecins manifestent ce mardi 29 avril contre la proposition de loi Garot qui vise à lutter contre les déserts médicaux en régulant leur installation, l’alternative présentée par François Bayrou – le fait pour les médecins de consacrer deux jours de consultation obligatoires par mois en zones sous-denses – rencontre aussi peu de succès. La mesure principale du Pacte de lutte contre les déserts médicaux proposé par le Premier ministre lors d’un déplacement dans le Cantal le 25 avril n’emporte pas l’adhésion escomptée. Pourtant, le chef du gouvernement l’envisage comme une « proposition et une incitation », en opposition à la démarche coercitive soutenue par Guillaume Garot et adoptée par les députés le 2 avril.

La disposition, basée sur un « principe de responsabilité et de solidarité territoriale », pourrait s’appliquer dès le mois de septembre. Les médecins – généralistes et spécialistes – des territoires bien pourvus devront consacrer un à deux jours par mois à des consultations dans des zones sous-denses limitrophes de leur lieu d’exercice. Ces zones « rouges » seront définies d’ici un mois par les ARS, en lien avec les édiles locaux. Des « contreparties financières » devraient être mises en place pour les médecins qui feront preuve de « solidarité ».

Que vont devenir mes cinquante patients quotidiens si je dois aller consulter ailleurs ? Ils se retrouveront devant un cabinet vide...

Dr Nils Morel, président du SNORL

Vases communiquants

Si Guillaume Garot juge la mesure « insuffisante », les syndicats de médecins refusent cette nouvelle solution à la problématique de l’accès aux soins et critiquent le flou entourant ses modalités. Le SNORL, déjà « vivement opposé » à la proposition de loi Garot qu’il considère comme « pénalisante, contreproductive et contribu[ant] à dégrader in fine l’offre de soins (...) », estime ces nouvelles propositions « inadaptées ». Pour le président du syndicat, le Dr Nils Morel, c'est un jeu de vases communicants : « Que vont devenir mes cinquante patients quotidiens si je dois aller consulter ailleurs ? Ils se retrouveront devant un cabinet vide..., explique-t-il. Sans parler du temps perdu dans le trajet où je ne consulterai pas non plus ! C’est grotesque. » Pour l’ORL, plutôt que de tenter de « résoudre la quadrature du cercle », « il faudrait déjà que l’État ne décourage pas les jeunes retraités qui veulent encore travailler ». « Qu’il tienne parole et élargisse l’exonération des cotisations vieillesse à tous les médecins libéraux en cumul emploi retraite, sans notion de plafond de revenus », ajoute-t-il. Autre mesure « plus simple à mettre en place », selon le président du SNORL : « Permettre aux praticiens de se faire remplacer lorsqu’ils opèrent ».

En attendant la situation s’aggrave dans certaines régions. Selon l’enquête menée par l'Union régionale des professionnels de santé - médecins libéraux du Grand Est, dont les résultats ont été publiés en décembre 2024, l’attente moyenne pour voir un ORL est de 115 jours dans le Grand Est et dans 39 % des cas, il n'est même pas possible de prendre rendez-vous. Le Dr Morel reconnait que « la situation actuelle est inconfortable, pour les patients et pour les médecins » et que « les délais s'allongent », mais il rassure : « Je n'ai pas connaissance de pertes de chance. » Et de relever : « C'est quand même extraordinaire que les politiques s'étonnent du produit de la politique de santé menée ces 30 dernières années... »

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