Faut-il laisser entrer les audios dans les Ehpad ? Morceaux choisis

Le cinquième épisode de notre émission Le Débat ! s’est penché sur le thème de l'exercice des audioprothésistes à domicile et dans les Ehpad. En effet, certains patients, parce qu’ils ne peuvent se déplacer, ne bénéficient pas aujourd’hui du 100 % Santé. Brice Jantzem, président du SDA, le Pr François Puisieux, directeur du pôle gériatrie du CHU de Lille, Christian Renard, audioprothésiste et fondateur du Samid, et le Dr Laurent Schmoll, ORL et fondateur de TokTokDoc, ont évoqué la nécessité d’encadrer les pratiques et de concevoir un parcours spécifique pour ces patients.

Par la rédaction
debat

Dr Laurent Schmoll, ORL et fondateur de TokTokDoc

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  • Avec la Policlinique mobile télémédecine, nous avons fait plus de 250 dépistages en Ehpad et 68 % des résidents ont des pathologies des conduits auditifs qui sont à 95 % des bouchons de cérumen. Mais le constat le plus navrant, c'est qu'il y avait des patients appareillés qui ne portaient plus leur aide auditive parce que plus personne ne savait l'entretenir.
  • L’audiométrie à distance, c’est une très bonne solution mais c’est très organisationnel. Il faut sur place à la fois des infirmières, formées comme dans le cadre de l’expérimentation article 51 et, de l’autre côté, la ressource médicale, qui est de plus en plus difficile à trouver.
  • L’audioprothésiste a toutes les compétences [pour renouveler un appareil] et donc effectivement on pourrait considérer que c’est une très bonne solution comme le font les pharmaciens. Une téléexpertise tous les 4-5 ans, en faisant parfaitement confiance à l’audioprothésiste avec un audiogramme, des photos de tympan et le médecin qui va valider dans 99 % des cas, m’apparaît une bonne solution.

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Christian Renard, audioprothésiste et fondateur du Samid

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  • On a fait un état des lieux en 1997 en lien avec le pôle de gérontologie et le GrapSanté : 82 % des patients institutionnalisés ne portaient plus leurs appareils. Et donc on a créé le Samid, pour former et sensibiliser les équipes soignantes et faire des actions spécifiques de repérage des troubles auditifs et de prise en charge.
  • On a été sollicités pour aller auditer une situation dans un Ehpad des Hauts-de-France dans lequel Moovaudio avait sévi, et on a constaté avec effroi le fait qu'en une demijournée, ils étaient venus appareiller plusieurs dizaines de résidents dans des conditions absolument inadaptées, avec des appareils sans gain, sur des dômes standards, sans otoscopie, sans test prothétique, et donc avec une inefficacité totale pour ces résidents. Certains avec des cophoses, des surdités profondes, des bouchons de cérumen.
  • L’étude Autonomia menée de 2009 et 2015 dans 41 Ehpad a montré, y compris chez des patients avec des troubles cognitifs et des niveaux de dépendance élevés, que des actions comme celles du Samid ont permis un changement radical : 86 % des patients qui étaient appareillés portaient correctement leurs appareils avec un suivi prothétique adapté.
  • La mise en place du 100 % Santé n'a pas pu bénéficier aux patients dépendants à domicile ou aux résidents d'Ehpad. La raison est simple, c'est que les contraintes pour l'appareillage sont les mêmes [que pour les patients autonomes].

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Pr François Puisieux , directeur du pôle gériatrie du CHU de Lille

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  • La grande majorité des personnes âgées dépendantes qui vivent en établissements sont dans l’incapacité d’utiliser leurs appareils seules. Et la bonne utilisation de l’appareillage va dépendre de l’entourage familial, mais aussi des professionnels de l’établissement. Or ces derniers ne sont pas formés à l’entretien et à la bonne utilisation de ces appareils. Et ce qu’a très bien montré l’étude menée par Monsieur Renard, c’est que quand on les forme, on passe de 80 % de non-utilisation à 80 % de bonne utilisation.
  • Il n’y a aucune raison que les résidents d’Ehpad, parce qu’ils ne sont pas susceptibles de se rendre au laboratoire de l’audioprothésiste, ne puissent pas bénéficier d’un appareillage satisfaisant. Et donc il faut envisager d’autres choses et il faut aller vers elles, nécessairement. C’est l’idée de l’article 51 mais il faut que cela se fasse dans des conditions parfaitement encadrées et claires.
  • Je pense que tous les audioprothésistes ne sont pas formés à appareiller des personnes très âgées, surtout celles qui ont des troubles cognitifs et qui sont dépendantes pour les actes de la vie quotidienne. Il y a besoin d’une formation spécifique.

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Brice Jantzem, président du SDA

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  • On ne peut pas simplement autoriser un audioprothésiste à aller dans l’Ehpad ou à domicile et à délivrer l’appareil. S’il n’y a pas toute cette formation du personnel, cette sensibilisation, cet accompagnement, ce plan de soins, ça ne peut pas marcher. L’appareil n’est pas autosuffisant.
  • Une des pistes serait d’avoir des audioprothésistes en pratique avancée. C’est-à-dire bien sûr de créer une nouvelle convention, tarification, des obligations différentes, en termes de matériel et d’actes. Mais aussi de « sélectionner » certains professionnels car on ne va pas autoriser tout audioprothésiste à intervenir.
  • L’article 14 de la convention avec l'Assurance maladie précise que l'appareillage à domicile, en Ehpad ou en tout cas en dehors de l'établissement de l'audioprothésiste, devra être envisagé dans le cadre d'expérimentations. C'est une ouverture pour l'avenir, mais en aucun cas de manière sauvage comme ça peut être fait actuellement.

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