Un « rappel nécessaire » sur les indications complexes de l'implant cochléaire

Le 8 mars, la SFA organisait un de ses « mardis de la SFA », un webinaire sur le thème de l’implant cochléaire, pour lequel la société savante a recensé 360 inscrits. L’occasion de faire le point sur certaines pathologies complexes, de parler de la nouvelle indication pour les surdités unilatérales et d’aborder la connectivité ainsi que les discussions par téléphone. Compte rendu, avec la Dr Isabelle Mosnier.

Propos recueillis par Bruno Scala
(c)D apres arkela Adobe Stock (adaptation E. Blot)

Audiologie Demain : Pourquoi avoir choisi le thème des implants cochléaires ?

Isabelle Mosnier : Aujourd’hui, en France, on implante seulement 5 % des indications potentielles, alors que tout est pris en charge par l’Assurance maladie. Le problème vient en fait d’une méconnaissance et d’une crainte de l’implant cochléaire et de l'intervention chirurgicale. Quant aux risques, ils sont exceptionnels. Le but du webinaire était de revenir sur les indications et la nécessité d’orienter les patients vers l’un des trente centres de référence d’implantation cochléaire français. Un rappel nécessaire puisque, régulièrement, des gens nous sollicitent alors qu’ils auraient dû être implantés il y a des années.

AD : Quelles sont les pathologies complexes pour lesquelles l’implant est indiqué ?

IM : L'une des principales indications complexes est la neuropathie. Chez, l’enfant, on sait que l’implant fournit de bons résultats, mais c'est plus variable chez l’adulte. Dans deux tiers des cas, on note une amélioration modérée et, dans un tiers, une amélioration comparable à une surdité endocochléaire. Souvent, les neuropathies isolées (non syndromiques) sont synonymes de meilleurs pronostics. Les patients précédemment appareillés obtiennent également de meilleurs résultats. Quoi qu’il en soit, il est important de bien informer le patient et le prévenir que l'implant peut n’apporter que des performances limitées.

Un autre groupe intéressant : les surdités profondes prélinguales congénitales. Jusqu’à présent, nous étions plutôt réticents à proposer l’implant à ces patients à l’âge adulte, en raison d’importants échecs par le passé. Aujourd’hui, on voit arriver de jeunes adultes avec des surdités prélinguales. Ils expriment une volonté d’amélioration et se sont en général bien renseignés sur l’implant. Leurs attentes sont réalistes. Dans ces cas-là, on implante. Nous avons réalisé une étude sur 28 patients [1]. Chez 19, on n’observe pas d’amélioration par rapport à l’aide auditive, mais tous considéraient que l’implant les aidait pour la lecture labiale. Les 15 autres affichent des performances proches de celles de patients avec surdité post linguale, avec une bonne intelligibilité, sans lecture labiale.

Par ailleurs, j’ai abordé le cas des sujets âgés. Il s’agit d’une indication standard, mais l’objectif était de rappeler que, même en cas de trouble cognitif mineur, l’implantation est indiquée. La surdité est le principal facteur de risque modifiable de démence et toutes les études ont montré que l’implantation améliore les fonctions cognitives.

AD : L’implant cochléaire bénéficie en outre d’une nouvelle indication, dont a parlé le Pr Mathieu Marx.

IM : En effet, pour les patients qui présentent une surdité profonde unilatérale avec acouphènes invalidants. Cette indication a été publiée au JO en septembre 2021. C'est le fruit notamment de deux études de recherche cliniques : l’une d’Oticon Medical menée par la Dr Christine Poncet-Wallet, et l’autre menée par le Pr Mathieu Marx. Dans ces études, plus de 90 % des patients bénéficiaient d’une nette amélioration des acouphènes un an après l’implantation.

AD : Le téléphone tient une place importante dans nos vies, y compris chez les implantés.

IM : Sur ce thème, l’orthophoniste Stéphanie Borel a exposé les résultats d’une étude de rééducation au téléphone. Il s’agit du programme TCT-9, pour téléréhabilitation de la communication téléphonique (9 faisant référence au nombre d’objectifs à atteindre). Une étude montre que TCT-9 permet à la majorité des patients d’utiliser davantage le téléphone. Le programme a fait l’objet d’un manuel de rééducation, publié grâce au soutien du Cisic (Centre d'information sur la surdité et l'implant cochléaire) et de la Fondation pour l’audition, et distribué gratuitement aux orthophonistes qui le souhaitent.

L’audioprothésiste Jonathan Flament a présenté les solutions de connectivité. C’est une évolution majeure de ces dernières années. Elle permet notamment de s’affranchir des bruits extérieurs. À noter qu’il est important, en cas d’appareillage controlatéral, de choisir des appareils compatibles.

[1] G. Lalhou et al. Journal of Clinical medicine, mars 2022, doi : 10.3390/jcm11071874

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