30 Avril 2025

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La fondation Rothschild ouvre le premier centre d’implant cochléaire privé autonome

Le premier centre privé autonome autorisé à exercer l’activité d’implantation en France a ouvert ses portes en septembre, à Paris. Adossé au service ORL de l'Hôpital Fondation Rothschild et dédié à l’adulte, il vient étoffer – et diversifier – l’offre de soins francilienne.

Par Ludivine Aubin-Karpinski
Mamelle
La Dr Elisabeth Mamelle, directrice du Ceica, avec une patiente, candidate à un deuxième implant.

C’était il y a encore peu de temps le Rubicon à ne pas franchir : l’ouverture de l’activité d’implantation cochléaire au privé divisait, certains craignant une dilution de la responsabilité et une perte de qualité. Mais en juin 2024, une structure a décroché le Graal, permettant une percée inédite du privé dans un secteur jusqu’ici sanctuarisé. Le Centre d’expertise en implant cochléaire et auditif (Ceica), porté par le service ORL de l’hôpital Fondation Rothschild* à Paris dirigé par le Dr Denis Ayache, figurait parmi la liste des 33 centres autorisés à exercer cette activité. Il est l’un des trois nouveaux établissements à obtenir sa labellisation avec le CHU de Poitiers et le CHU de Guadeloupe. Une satisfaction pour Denis Ayache après un premier échec en 2019 lors de l’ouverture d’une candidature pour l’Ile-de-France, remportée à l’époque par l’AP-HP et le centre de Kremlin-Bicêtre, dirigé par le Dr Jérôme Nevoux. « Nous sommes le premier centre non universitaire en autonomie**, se félicite le Dr Denis Ayache. Pourquoi nous ? Car notre service bénéficie d’une vraie légitimité et d’une renommée dans le monde de l’oreille. Mais il nous manquait une brique : nous étions contraints d’adresser nos patients candidats à l’implant ailleurs. De nombreux correspondants en ville attendaient que nous y allions. Aujourd’hui, les patients ne sont plus face à un choix monolithique. Nous pouvons les prendre en charge de A à Z. »

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Élargir l’offre de soins

C’est aussi le bon moment, aux yeux du Dr Ayache. « J’aurais pu me lancer à mon arrivée à l’hôpital Fondation Rothschild en 1995 mais cela ne me semblait pas opportun à l’époque, commente-t-il. Il me semblait qu’il y avait suffisamment de centres qui exerçaient cette activité, de façon parcimonieuse, pour peu de patients finalement... » La situation a évolué depuis et l’ouverture du Ceica s’inscrit en effet dans un contexte d’augmentation des besoins. « Les indications s’élargissent et le bénéfice patient est de plus en plus important, explique le Dr Denis Ayache. Les candidats à l’implant cochléaire sont plus nombreux et la file active ne cesse de croitre. Les technologies et l’acte chirurgical ont aussi grandement évolué ces dernières années. Lorsque j’étais interne, l’implantation cochléaire s’apparentait à une greffe du cœur ou du poumon ; aujourd’hui, on fait ça en ambulatoire. »

Autre raison évoquée par le Dr Ayache : la nécessité d’améliorer l’accès à ce dispositif. En France, le taux de pénétration de l’implant demeure relativement faible. « D’un point de vue du maillage territorial, il est important de pérenniser un centre dans le Nord parisien, capable de répondre aux besoins d’un bassin de population peu doté, a fortiori avec la fermeture de l’unité de l’hôpital Rothschild », justifie Denis Ayache.

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Transfert d’une partie de l’équipe du Cric

L’ouverture du Ceica a en effet coïncidé avec la fermeture du Centre de réglage des implants cochléaires (Cric) de l’hôpital Rothschild (AP-HP), devenant ainsi le troisième centre référent pour l’adulte d'Ile-de-France aux côtés de ceux de la Pitié-Salpêtrière et du Kremlin-Bicêtre (lire l’encadré). À l’automne, une partie de l’équipe du Cric a rejoint celle de la Pitié pour « renforcer cette activité d’expertise par effet de synergie », selon la direction de l’AP-HP. Mais certains membres, dont la cheffe de service Élisabeth Mamelle, ont fait le choix de rallier le privé et le Ceica, fraichement labellisé. Un Rothschild pour un autre. « La fusion avec la Pitié, qui était prévue de longue date, tardait à se mettre en place, avec son lot d’incertitudes, et le CRIC ne disposait pas de moyens pour se développer, explique l’ORL. Lorsque l’équipe du Dr Ayache a obtenu la labellisation, nous nous sommes rendu compte de notre complémentarité. Nous avions l’expertise – y compris sur les acouphènes – ainsi que le personnel formé ; ils bénéficiaient d’une équipe de chirurgiens spécialisés en otologie, de l'imagerie spécialisée, un plateau d'explorations audiovestibulaires complet... tous les ingrédients pour construire un beau centre d’implantation cochléaire. » De ce fait, le Ceica ne démarre pas ex nihilo mais bénéficie à la fois des compétences du service d’ORL de l’hôpital Fondation Rothschild et de l’expérience du Cric. Le temps que les choses se mettent en place et d’installer le centre dans des locaux provisoires face au bâtiment du service ORL, l’activité n’a véritablement commencé qu’en fin d’année 2024.

Des ambitions nouvelles

Bergheaud web
Stéphane est bi-implanté. Les réglages de ses appareils sont revus dans le cadre de son bilan annuel. L’occasion pour l’orthophoniste Marielle Bergheaud de constater qu’il les porte 15 heures par jour en moyenne et de lui proposer d’utiliser l’appli plutôt que la télécommande.
Et celle-ci est déjà importante. Le nouveau centre accueille des personnes implantées pour leurs bilans annuels et a réalisé une trentaine d’implantations depuis son ouverture. L’équipe vise entre 60 et 80 opérations d’ici la fin de l’année et 120-130 en 2026. Le parcours patient a été repensé avec le souhait de personnaliser les soins et les modalités de suivi. Le Ceica cultive quelques spécificités et en particulier l’importance accordée à la rééducation orthophonique. Celle-ci est réalisée sur place, au moins la première année, par les orthophonistes « maison » et non externalisée vers des praticiens de ville. Une disposition que Denis Ayache juge « plus efficiente et qualitative », permettant l'instauration d’un véritable suivi.

Autre particularité du nouveau centre implant parisien : l’accent mis sur l’accompagnement psychologique, notamment post-implantation. « C’est une façon de nous assurer que nos patients s’adaptent bien à leurs implants, à leur nouvelle identité et de les soutenir en cas de légers retards au démarrage car cela peut s’avérer anxiogène », souligne la Dr Élisabeth Mamelle. Les associations de patients jouent un rôle important au sein du centre, comme l’Association nationale des implantés cochléaires (Anic) qui tient une permanence hebdomadaire dans les locaux du Ceica. Dans cet esprit, des ateliers pré-implants sont également proposés quatre fois par an, réunissant un représentant de chaque profession de santé impliquée au centre, un patient expert et des candidats à l’implant. « C’est un temps plus informel et convivial à l’occasion duquel nous répondons à leurs questionnements et apprécions leur état d’esprit, leur motivation », indique encore l’ORL.

L’équipe du Ceica travaille en outre à simplifier le parcours patient, en concentrant la prise en charge pré et post implantation. L’idée est de proposer un parcours « accéléré » mais « sans zapper des étapes », « en se concentrant sur les phases importantes et en allégeant ce qui ne l’est pas en fonction des patients », explique la Dr Mamelle. Le même esprit gouverne le rythme des séances de réglages : celles-ci sont concentrées, à raison de 4 réglages les trois premiers mois, en comptant l’activation. « Un bon compromis, selon l’ORL. C’est suffisant et cela laisse le temps aux patients de s’adapter. »

Moderniser le parcours de soin

Les projets ne manquent pas non plus : l’équipe envisage notamment d’initier des travaux de recherche sur les thérapies intracochléaires ou le développement du télésoin. Une fois de plus, l’ambition est de moderniser le parcours pour les patients et de regagner du temps médical pour le réinvestir sur les patients plus complexes, l’organisation d'ateliers... Pour Élisabeth Mamelle, « c'est une solution très prometteuse pour développer plein d'autres choses pour les personnes implantées et ne pas se contenter d'un suivi classique mais vraiment personnalisé et adapté à chacun ». « Mais pour que les professionnels puissent s’y mettre, il faut leur permettre d’en tirer bénéfice », glisse le Dr Ayache.

Parmi les autres projets dans les tuyaux figure d’ici deux ans le déménagement du Ceica dans ses locaux définitifs, au sein du même bâtiment que le service ORL. Ce sera aussi l’heure d’un premier bilan, deux ans après la labellisation. « En tant que centre privé, nous serons scrutés, prédit Denis Ayache. C’est de bonne guerre car c’est une première. Il est normal que l’on s’assure que nous ne nous sommes pas plantés. »

Equipe
L’équipe du Ceica (de gauche à droite) : Dr Denis Ayache (chef de service), Dr Maria Pia Tuset (assistant), Dr Mary Daval (cheffe de service adjointe), Aline Gueorguieva (coordinatrice), Émilie Ernst (orthophoniste), Dr Élisabeth Mamelle (directrice du Ceica), Dr Andra Sebestyen (PH), Sébastien Bergère (audioprothésiste), Lucie Jeanne (orthophoniste), Marielle Bergheaud (orthophoniste), Dr Hugo Benamron (assistant), Sonia Guergous (secrétaire médicale).
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