« La notion de micro-silence est fondamentale pour la santé auditive »

À l’heure où nous mettons sous presse, la 19e Semaine du son de l’Unesco est sur le point de s’achever. La soirée du 19 janvier, qui s’est déroulée au sein de l’Unesco, était consacrée à la santé auditive. Plusieurs thématiques ont été abordées par les orateurs, dont la mise en place d’un partenariat avec l’Institut de l’audition, les résultats des travaux de l’équipe de Paul Avan sur les sons compressés et le projet de faire des audioprothésistes des référents du son. Explications avec Christian Hugonnet, fondateur et président de La Semaine du son.

Propos recueillis par Bruno Scala
Christian Hugonnet

Audiologie Demain : En quoi consiste le partenariat que La Semaine du son a noué avec l’Institut de l’audition ?

Christian Hugonnet : La Semaine du son et l’Institut de l’audition ont un intérêt à collaborer ; nous nous apportons beaucoup mutuellement. Notre transversalité, à travers notre relation avec le monde artistique, avec le monde industriel (acoustique, etc.), les intéresse beaucoup car ils sont dans la recherche et le sanitaire. L’étude sur la compression du son (voir plus bas) émane de cette complémentarité : nous leur apportons des connaissances sur la physique du son, qu’ils n’ont pas forcément. Et inversement, cela nous confère une assise et une caution importantes pour tout ce qui touche à la santé auditive. Il y a une dimension essentielle également : nous portons une vision positive de l’audition. Nous l’avons toujours envisagée sous l’angle du cadre de vie, et non de la pénibilité ou de la maladie. Concrètement, ce partenariat se traduira par des rencontres au sein de groupes de travail auxquels nous serons associés, ainsi qu’un échange de logos.

AD : Les travaux sur la compression du son que vous évoquiez ont été présentés par Paul Avan. Quels sont les résultats ?

CH : Tout est parti de cette intuition, qui était la mienne mais aussi celle de nombreux musiciens ou ingénieurs, que la musique surcompressée était nocive. Encore fallait-il le démontrer. Grâce au soutien financier de la Fondation Écouter Voir, nous avons pu monter une étude sur les cochons d’Inde, que nous avons confiée à Paul Avan (Ceriah/Institut de l’audition) et Tamara Dos Santos, postdoctorante dans son équipe. Ces travaux ont montré que la notion de micro-silence est fondamentale pour la santé auditive. La musique surcompressée est tassée sur une plage dynamique de 3 ou 4 dB, et plus rien ne respire ! On remplit l’espace sonore et on supprime ces micro-silences qui sont indispensables au fonctionnement de l’oreille interne, et probablement du cerveau – car, comme l’a expliqué la Pr Christine Petit, il faut arrêter de dissocier l’audition du cerveau. Ainsi, les cochons d’Inde exposés à la musique surcompressée mettaient plusieurs semaines à récupérer (leurs réflexes protecteurs, NDLR – lire l’article que nous avions écrit l’an dernier, lors de la présentation des résultats préliminaires : Les animaux exposés à la musique compressée sont vulnérables), là où les animaux exposés à la même musique non compressée, récupèrent presque instantanément. Ce qui veut dire que le dogme consistant à préconiser de « faire des pauses sonores toutes les quatre heures » est caduc.

AD : Quelle suite allez-vous donner à ces travaux ?

CH : Nous allons poursuivre l’étude pour affiner nos résultats. Mais, forts de ces premiers enseignements, nous allons aussi, en partenariat avec Universal et l’Ircam, développer un label, qui sera déposé sur les albums, et qui garantira un faible niveau de compression. C’est un pas en avant très important !

AD : Lors de cette soirée de la santé auditive, Arnaud Coez a présenté un projet, en partenariat avec l’Association des maires de France, consistant à faire des audioprothésistes des référents du sonore. Pouvez-vous nous expliquer ce projet ?

CH : Arnaud Coez a fait une présentation interactive, qui permet de découvrir les différentes notions du son, le décibel, etc. Ce document, avec un micro et un haut-parleur, constitue un kit de sensibilisation que nous mettons à disposition des audioprothésistes. Pour déployer ce projet, nous avions besoin de la collaboration de l’Association des maires de France. Les édiles accueilleront ainsi les audioprothésistes, qui sensibiliseront les populations. Tous les professionnels volontaires peuvent participer à ce projet et devenir les référents son au sein de leurs régions.

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