Décloisonnement et coopération. Ce sont les maîtres mots du rapport d’information sur l’« Organisation des professions de santé : quelle vision dans dix ans et comment y parvenir ? », présenté le 7 juillet 2021 devant la Commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale par le député Cyrille Isaac-Sibille. Ce travail formule un certain nombre de préconisations pour moderniser l’organisation du système de santé et lui permettre de faire face aux enjeux actuels et à venir de vieillissement de la population et d’explosion des maladies chroniques, dans un contexte de démographie médicale en berne et d’inégale répartition des professionnels sur le territoire. « Nous ne pourrons pas faire face [à ces défis] si nous conservons un système dans lequel la répartition des compétences entre professions médicales et paramédicales est extrêmement rigide et dans lequel encore trop peu de place est faite au travail en équipe et aux délégations de tâches », résume le député.
La « théorie de l’escalier »
Le rapport, dont la qualité a été saluée unanimement lors de son examen, émet quatre propositions d’ordre général pour améliorer l'accès aux soins, et tout d’abord une montée en compétences de l’ensemble des professions de santé et l’orientation du rôle du médecin vers celui de coordinateur de soins. Il substitue à l’approche traditionnelle, trop souvent envisagée négativement par les différentes professions, jalouses de leur pré carré, une logique « de l’escalier » dans laquelle « chaque professionnel verrait progressivement son champ de compétences étendu ». Les autres leviers concernent le recours à l’exercice en pratique avancée, le renforcement des missions de prévention et du travail en équipe avec, en filigrane, la nécessité d’instaurer de nouvelles modalités de financement plus propices aux collaborations. Certaines de ces propositions pourraient bien trouver place dans le prochain PLFSS.
Réaffirmation du principe de séparation de la prescription et de la vente
Concernant plus particulièrement la filière auditive1, Cyrille Isaac-Sibille, qui a d’ailleurs été auditionné par la mission Igas en cours, pointe le risque de difficultés d’accès aux soins, « dans la mesure où une grande partie des médecins ORL partiront à retraite dans les dix prochaines années ». Pour le rapporteur, il est possible de réfléchir à de potentielles délégations de tâches entre les professionnels de l’audition mais, souligne-t-il, « il faut garder à l’esprit l’importance de séparer les actes de prescription et les actes de vente pour les dispositifs d’audioprothèses ». Selon lui, la solution est davantage à chercher « sur la place que pourraient avoir les audioprothésistes au sein de structures médicales » – il s’agit là de la proposition n°10 du rapport – et le renforcement de la coopération entre les professionnels de l’audition. Une coopération qui doit s’exprimer « plus largement, entre l’ensemble des professions médicales et paramédicales en charge du repérage des fragilités – dont les troubles auditifs – chez les personnes âgées ».
Il faut garder à l’esprit l’importance de séparer les actes de prescription et les actes de vente pour les dispositifs d’audioprothèses.
S’assurer de la qualité de l’appareillage
Interrogé par Audiologie Demain, Cyrille Isaac-Sibille, qui est également médecin ORL et rapporteur devant la commission des Affaires sociales de l’évaluation du 100 % Santé, a tenu à souligner la réussite de la réforme. « En six mois, les objectifs que nous nous étions fixés ont presque doublé, a-t-il commenté. C’est un vrai succès sachant que la population de malentendants en France était sous-équipée. » Le député a toutefois insisté sur l’importance de s’assurer de la qualité et du suivi, mettant en garde contre les risques que des dérives pourraient faire courir sur la réussite de la réforme. « Il ne faudrait pas que ces appareils médicaux, désormais totalement remboursés, deviennent des gadgets, a-t-il rappelé. Des aides auditives dans le tiroir seraient une mauvaise publicité pour l’appareillage auditif. Il faut qu’une évaluation de l’appareillage soit mise en place et que la satisfaction des patients soit suivie au travers de questionnaires de satisfaction. »