La musique adoucit les moeurs mais là ne s’arrête pas le nombre de ses vertus. Elle a, sur notre santé, bien des effets bénéfiques – à condition de ne pas l’écouter trop fort. Le point d’orgue de cette réputation a sans doute été la découverte, en 1993, de l’effet Mozart (voir encadré), en réalité complètement surestimé, mais qui a marqué à tout jamais la musique comme un ascenseur éducatif. Plus récemment, des chercheurs se sont intéressés aux bienfaits de la musique sur nos capacités auditives ou plus exactement, nos capacités à correctement encoder les sons. En effet, la musique agit à des étages supérieurs à l’oreille, dans le cerveau, et conférerait aux musiciens une meilleure attention auditive sélective.
Parole et musique, même traitement
Les musiciens ont, en termes d’encodage de sons, une mesure d’avance sur les non musiciens. En effet, ces derniers développent des capacités étonnantes à encoder fidèlement les différentes composantes de la musique et sont aussi plus à même de déceler de sensibles variations de hauteurs. Or ces petits détails, que les non musiciens ont plus de peine à détecter, sont autant d’indices pour bien saisir les nuances d’un discours, comme les émotions ou les intonations. Des avantages qui semblent logiques puisqu’en termes cognitifs le traitement de la musique ou de la parole requiert des capacités mnésiques et attentionnelles communes. Mais c’est surtout pour la compréhension de la parole dans le bruit que la pratique musicale offre un sérieux avantage. Chez les musiciens, l’effet cocktail party, qui consiste à isoler une source sonore au milieu d’un brouhaha, est amélioré. Car la pratique musicale confère une meilleure mémoire de travail (à court terme). Or des travaux suggèrent que cette capacité mnésique est nécessaire pour compléter les trous générés par le brouhaha dans un flux de parole. D’ailleurs, les personnes bénéficiant d’une importante mémoire de travail ont besoin de fournir moins d’effort pour comprendre dans le bruit.
Un encodage plus fidèle chez les musiciens
Par ailleurs, les musiciens encodent plus fidèlement les informations auditives. Ceci a été montré par les équipes de Nina Kraus (université Nortwestern, États- Unis), grâce à l’observation et la comparaison des réponses soutenues en fréquences (frequency following responses, FFR) de musiciens et non musiciens. Les FFR fournissent des indications sur la façon dont les stimuli sonores sont encodés car elles possèdent des caractéristiques physiques similaires au stimulus qui les a évoquées. Plus la ressemblance entre le stimulus et les FRR est importante, plus l’encodage est de qualité. Dans le silence, les FFR de musiciens et de non musiciens évoquées par la parole sont similaires. En revanche, dans le bruit, la différence est très nette, en faveur des premiers, ce qui suggère que l’encodage de la parole au niveau du tronc cérébral est plus résistant aux interférences chez les musiciens. Un avantage qui viendrait d’une représentation plus fidèle aussi bien des sources sonores d’intérêt que du bruit, permettant une meilleure séparation des deux.
La musique apparaît comme un moyen de prévention éprouvé, dans certains troubles du langage et de l’audition. Mais ce n’est pas tout : les pages suivantes montrent qu’elle peut aussi avoir des vertus thérapeutiques.