Si l’implantation cochléaire en cas de surdité unilatérale est indiquée en premier lieu pour soulager un acouphène, elle peut aussi apporter une amélioration globale de la qualité de l’audition chez ces patients à condition de développer leur perception auditive grâce à une rééducation orthophonique. Et ce, dès la mise en service du processeur vocal de l’implant. « La rééducation est évoquée avec le patient dès le bilan préimplant et prescrite pour une durée de six mois minimum, comme pour toute implantation cochléaire », rappelle Stéphanie Borel, orthophoniste au sein du centre référent d’implantation cochléaire chez l’adulte, à l’AP-HP.
L’objectif est triple : stimuler l’oreille implantée pour y développer la compréhension de la parole, améliorer la communication dans le bruit et en groupe, et améliorer la localisation sonore. « Pour être bénéfique, la prise en charge orthophonique doit toutefois être adaptée aux spécificités de ces patients dont l’oreille controlatérale peut être très performante, voire parfaitement entendante », souligne Stéphanie Borel. L’indication d’implantation en cas de surdité unilatérale ou asymétrique étant encore récente (lire notre article Une nouvelle indication pour l’implant cochléaire), les spécificités de la prise en charge orthophonique peuvent encore être méconnues des professionnels. « Elles sont aujourd’hui enseignées dès la formation initiale, ainsi qu’en formation continue », précise Stéphanie Borel, également enseignante au département d’orthophonie de Sorbonne Université, à Paris.Contourner l’oreille entendante
Pendant les séances, il est impératif de contourner l’oreille sans implant, qui entend bien, pour faire travailler l’autre, récemment implantée. « Utiliser des bouchons d’oreille n’est pas suffisant, avertit l’orthophoniste. Pour être sûr de ne stimuler que le côté implanté, lors des exercices de rééducation, deux alternatives existent : soit y envoyer directement le son en utilisant les accessoires fournis avec l’implant, ou la connexion directe entre le processeur et le téléphone ou l’ordinateur, soit envoyer du bruit dans l’oreille fonctionnelle pour la masquer, mais cela demande plus de concentration au patient. Ce sont des points techniques importants car sinon, on travaille dans le vide ! » Entre les séances, tous les jours ou tous les deux jours, il est également primordial que le patient pratique, en autonomie, des exercices en ligne, avec son accessoire. Car, dans la vie quotidienne, il n’a que peu l’occasion d’entraîner sa compréhension via le côté implanté, l’autre ayant tendance à prendre le dessus. La localisation sonore peut quant à elle être exercée selon des modalités droite/gauche et avant/arrière. « Pour la localisation, l’orthophoniste de ville ne dispose souvent pas de matériel permettant de travailler davantage d’axes », constate-t-elle.
Enfin, il est important de noter que ces patients se démarquent souvent de ceux qui rentrent dans les critères habituels d’implantation. « Soit leurs attentes en termes d’amélioration auditive sont très élevées, soit, à l’inverse, il n’y a aucune demande auditive car la raison première de leur implantation était de soulager un acouphène… ce qui génère dans les deux cas un risque d’abandon de la rééducation plus important », met en garde Stéphanie Borel.