Fabien Seldran, ingénieur clinique chez MED-EL

Nouvel opus de notre cycle « De l’autre côté du miroir » consacré aux audioprothésistes qui ont fait le choix d'intégrer les équipes d'industriels, avec Fabien Seldran, ingénieur clinique chez MED-EL depuis 2011.

Propos recueillis par Ludivine Aubin-Karpinski
(c) zenzen AdobeStock

Audiologie Demain : Pourquoi avoir fait le choix de l'industrie ?

Fabien Seldran : Cela s'est fait naturellement. MED-EL a financé ma thèse (bourse Cifre) et dans la continuité, j'ai basculé sur un poste de support clinique. Ce partenariat industriel débouche sur un système gagnant-gagnant. Cela donne à l’étudiant la possibilité de poursuivre ses études et dans la plupart du temps, l'opportunité de travailler chez l'industriel qui l'a financé, dans un domaine qu'il connaît déjà. Pour l'industriel, c'est un investissement qui lui permet d'avoir quelqu'un bénéficiant d’une formation avancée et qui connaît le produit. À ce poste, il faut maîtriser beaucoup de notions, à la fois du domaine de l'ingénieur et du domaine de l'audioprothésiste. Il faut du temps pour qu'un nouvel employé soit pleinement opérationnel.

Dans l'industrie, nous découvrons le produit en profondeur et nous devons le maîtriser parfaitement pour pouvoir ensuite former les audioprothésistes aux réglages. Nous devons également être capables d'expliquer en quoi nos produits sont différents de ceux de la concurrence en termes de fonctionnement, dans le sens où la philosophie de réglage est différente selon les marques.

L'avantage numéro un, c'est qu'on connaît parfaitement le système, on dispose des ressources auxquelles l'audioprothésiste de terrain n'a pas forcément accès.
On voit une grande variété de profils de patients, qu'on ne rencontrerait pas tous les jours en cabinet d'audioprothèse. (Les gens ne nous appellent jamais quand tout va bien.) Pour chaque nouveau cas, il faut repartir de zéro. D'abord on essaye de décrypter et d'analyser le ressenti du patient. En fonction de son ressenti, soit le diagnostic est assez évident, soit il va falloir réaliser toute une batterie de tests pour cibler la cause du problème. On doit comprendre le patient, mais aussi comprendre le dispositif. Et on doit se demander comment le modifier pour faire en sorte qu'il soit mieux accepté par le patient et pour qu'il lui fournisse un bénéfice.
Autre avantage : c'est qu'il n'y a pas de monotonie. C'est le côté "riche" de la réflexion qu'on doit avoir pour optimiser le bénéfice du patient.

Nous devons être capables d'expliquer en quoi nos produits sont différents de ceux de la concurrence en termes de fonctionnement, dans le sens où la philosophie de réglage varie selon les marques.

Audiologie Demain : Quelles difficultés rencontrez-vous ?

Fabien Seldran : Dans le cas de l'implant cochléaire, si le patient a un problème, il n'entend plus du tout. Il faut donc être réactif très rapidement et ce n'est pas toujours évident pour la gestion du planning.
Pour certains patients, le bénéfice est limité et nous n'avons pas beaucoup de marge de manœuvre pour optimiser les réglages. Dans la mesure où on représente le fabricant, le patient nous perçoit comme « l'expert » et attend beaucoup de nous. Malheureusement, dans certains cas, l'audioprothésiste a déjà exploré toutes les pistes et il faut faire comprendre au patient qu'on ne pourra pas forcément faire mieux.

Audiologie Demain : Comment jugez-vous l'évolution de l'audioprothèse aujourd'hui ?

Fabien Seldran : Je suis plutôt content de l'évolution de l'audioprothèse. Je suis impressionné par l'évolution des systèmes depuis ces dix dernières années, du point de vue traitement de son et qualité du signal, du point de vue fiabilité, discrétion et possibilités de communication avec le 2,4 GHz. Et également en termes de prise en charge. Quand on connaît les conséquences de la surdité, par exemple sur le déclin cognitif, on se dit que l'audition doit être accessible à un maximum de personnes. Et, grâce aux appareils classe I, le 100 % Santé va permettre à des personnes qui n'ont pas forcément beaucoup de moyens, de bénéficier d'un appareillage. Il faut espérer que tous les acteurs du domaine joueront le jeu de la réforme.
En ce qui concerne la formation, je trouve qu'elle a évolué dans le bon sens. À la fois par la richesse de son contenu, à la fois par la possibilité de continuer en master ou en école d'ingénieur après le DE ou en parallèle.

 

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